Bref l’œil mesurant tout d’une même mesure,
À soi-même inconnu, connaît tout l’univers,
Et conçoit dans l’enclos de sa ronde figure
Le rond et le carré, le droit et le travers.
Toutefois ce flambeau qui conduit notre vie
De l’obscur de ce corps emprunte sa clarté.
L’anatomie de l’œil, Pierre de Marbœuf
Sous la peau lisse et blanche de la peinture, l’obscur et le noir « la chair qu’on ne voit jamais, le fond des choses, l’envers de la face, du visage »1. L’icône moderne de Malévitch s’assombrit d’un détour baroque au travers des plis obscurs qui hantent les carrés noirs du début de cette série. La couleur principale de ces tableaux, le noir d’ivoire produit d’une combustion, appelle le feu qui apparaît sur la toile par ses bords ou ses rives, le charbon et la cendre. Dans l’insistance de la répétition qu’est la série, des événements surgissent, l’orthogonalité des châssis s’ouvre aux courbes, des protubérances percent la régularité des contours et la série dérive vers le mouvement qui accueille le vide comme élément de sa dynamique.
J. Lacan, Séminaire, II. Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse (1954-1955)